Clipanorama #15

Woodkid, Pale Yellow
Après Goliath, Yoann Lemoine, plus connu sous le nom de Woodkid, dévoile Pale Yellow, deuxième extrait de son nouvel album du même nom. On y retrouve le souffle épique si caractéristique du musicien dijonnais, qui s’installe en crescendo jusqu’à l’explosion de beats aux sonorités métalliques, rappelant les rouages bien huilés d’une industrie qui fonctionne. Celle de Woodkid en l’occurrence. Pour donner vie à cette machine humaine, Yoann Lemoine s’est lui-même chargé du développement 3D et Motion Design au cœur de la vidéo. Et à ce jeu-là, le Xavier Dolan du clip, véritable control freak de la chaîne créative, nous en met plein la vue. Son visage mi-homme mi-machine, reproduit en images de synthèse, est époustouflant de réalisme. Ce duo musique-images intense nous offre une plongée dans les entrailles de la machinerie intérieure, de l’âme, en opposition au gigantisme oppressant de Goliath. C’est ce qu’on appelle rouler des mécaniques, dans le bon sens du terme.

Asaf Avidan, Lost Horse
Après trois longues années de silence, la voix hors du commun d’Asaf Avidan nous revient enfin aux oreilles, dans Lost Horse, premier extrait de son nouvel album, Anagnorisis, prévu pour septembre 2020. Dans cette balade d’une tristesse sourde, le chanteur israélien met en musique ses affections sentimentales. Sa mélancolie prend vie grâce aux images habilement montées par la réalisatrice Adi Halfin, à mi-chemin entre clip et documentaire. La vidéo repose en effet sur la captation de la vie d’un couple de danseurs contemporains, Bobbi Jene Smith et Or Schraiber, qui s’est filmé pendant le confinement, pour saisir son quotidien à deux, entrecoupé de performances dansées, émotionnelles et passionnelles. Original, ce dispositif formel illustre avec justesse la complexité des relations amoureuses, entre vie ordinaire et vie fantasmée.

Sarah Rebecca, Call Me
Américaine expatriée en France depuis ses 18 ans, c’est à Paris que la chanteuse Sarah Rebecca, initialement formée au gospel, a développé l’univers pop-électro qu’elle nous fait découvrir dans son premier album, Piano Versions, sorti en avril dernier. Pour créer la signature visuelle du single Call Me, la chanteuse originaire du Mississippi a choisi une autre jeune femme prometteuse, la Française Rosalie Charrier (nous l’avions rencontrée lors du dernier festival de la culture clip TÉMA ! : https://www.somewhereelse.fr/agenda/tema-3/). La réalisatrice de 25 ans aime toujours autant ce qui brille, et pour Sarah Rebecca, elle imagine un univers fantasmatique, dans lequel un conflit de couple se transforme en quête labyrinthique du désir dans les méandres d’une entrepôt désaffecté. Les deux amants finiront par se retrouver dans un bar à l’ambiance baroque où Sarah Rebecca, sirène aux cheveux platine, les attire en susurrant des Call Me qui évoquent immanquablement Debbie Harry, mâtinée de Julee Cruise, la chanteuse au timbre planant qui officiait au Roadhouse, le bar de nuit de Twin Peaks. Pour reconquérir sa belle, le garçon devra écarter un rival interprété par Maxence Danet-Fauvel, l’une des stars de l’excellente série teenage Skam… Entre glamour hollywoodien vintage, reste de paillettes disco et atmosphère post-industrielle, on nage en plein imaginaire lynchien, réinvesti par la génération Y-Z.