Amazing Stories, Histoires fantastoc ?

Les reboots et les anthologies sont à la mode. Apple se joint à la fête en ressuscitant Amazing Stories de Steven Spielberg,
35 ans après l’originale, toujours sous la houlette du maestro.
Verdict : pas si fantastique.

Par Julien Lada

Temps de lecture 5 min

Amazing Stories

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À l’origine, il y avait Amazing Stories. La série voit le jour en 1985 sur la chaîne américaine NBC, en réponse au projet de sa rivale CBS de faire renaître La Quatrième Dimension, la série culte de Rod Serling, maître étalon des anthologies télé. Le contexte est porteur : deux ans plus tôt, le film à sketchs La Quatrième dimension, dont l’un des segments était réalisé par Steven Spielberg, a fait un carton en salles. Pour concurrencer CBS, NBC parvient à convaincre le réalisateur de prendre les rênes d’une autre anthologie télé, baptisée Amazing Stories (Histoires fantastiques en VF), en hommage au magazine de science-fiction éponyme lancé en 1926 par Hugo Gernsback, précurseur des pulp fictions.

La chaîne met les moyens pour permettre à Spielberg d’attirer aussi bien le gratin des réalisateurs hollywoodiens (Scorsese, Dante, Eastwood, Zemeckis, Kershner, Tobe Hooper…) que des grands noms de la littérature SF comme Richard Matheson (Je suis une légende) ou Rockne O’Bannon (Farscape). Ce prestigieux Who’s Who ne suffit pas cependant à garantir le succès de l’anthologie, annulée au terme de sa deuxième saison en raison d’audiences médiocres, qui ne parviennent pas à lutter contre la popularité d’Arabesque, programmée à la même heure sur… CBS ! Amazing Stories laissera derrière elle 45 épisodes de qualité très inégale, et les prémisses de quelques belles carrières (dont celle d’un certain Brad Bird, qui y signe un épisode tout en animation, Family Dog, l’un des plus beaux de la série).

Mais voilà que trois décennies plus tard, face à la recrudescence des anthologies fantastiques en tout genre – remises au goût du jour par le succès de la novatrice Black Mirror -, Apple TV+ remet la main sur la licence Amazing Stories, Spielberg reprenant sa casquette de producteur exécutif. Le résultat est-il plus convaincant que la décevante relecture de The Twilight Zone par Jordan Peele l’an dernier ? Nous n’avons pu voir que le quatrième épisode de cette nouvelle mouture, The Cellar, le seul mis à disposition par Apple avant le lancement de la série. Malheureusement, la première impression n’est pas très bonne. Certes le générique, qui reprend le thème de l’original signé John Williams, ainsi que la typographie jaune et cartoonesque de son titre, garde de son charme suranné. Mais très vite, la différence saute aux yeux : emboîtant le pas à la nouvelle Twilight Zone, la version 2020 d’Amazing Stories est partie pour adopter un format 52 minutes, en rupture avec le traditionnel 26 minutes des anthologies classiques.

The Cellar n’offre rien de cette audace et de cette énergie foutraque
qui faisaient la singularité de l’originale

Le problème, c’est que le pitch n’est pas assez solide pour justifier la durée. Dans The Cellar, deux frères retapent une maison de campagne abandonnée quand le plus jeune des deux (Dylan O’Brien, de Teen Wolf) découvre dans la cave un baromètre permettant, les soirs de grande tempête, de voyager à travers le temps. Renvoyé un siècle dans le passé, il y fait la rencontre d’une jeune femme aperçue sur une photo dans la bâtisse cent ans plus tard. On a connu plus « amazing » comme concept… Et si la romance entre Dylan O’Brien et Victoria Pedretti (The Haunting of Hill House) fonctionne plutôt bien, l’exécution est paresseuse, étirant outre-mesure une idée de départ qui, ironie du sort, aurait mieux fonctionné avec 25 minutes de moins.

Ainsi The Cellar donne-t-il la sensation d’un spectacle générique, incapable de se démarquer du reste des productions anthologiques contemporaines. Le charme des Amazing Stories 1985 reposait sur l’influence revendiquée des pulp fictions. Les épisodes étaient parfois boiteux, voire franchement ratés, mais ils n’hésitaient pas à nous emmener dans des territoires inhabituels. Dans son épisode le plus célèbre, The Mission, Spielberg faisait même apparaître des roues de secours magiques, dessinées sur la pellicule, pour sauver un avion de la Seconde Guerre Mondiale. The Cellar n’offre rien de cette audace et de cette énergie foutraque, qui faisaient la singularité de l’originale. Il ne reste plus qu’à espérer que le reste de la saison retrouve un peu de cet esprit mal élevé.

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