Jessica Forever – Poetic Justice
Film. Jonathan Vinel et Caroline Poggi sont les jeunes espoirs du cinéma d’auteur hexagonal…
Leur premier long métrage se révèle une fable futuriste et noire,
inquiétante à plus d’un titre.
Par Jacques Braunstein
Temps de lecture 3 min.
« Film le plus attendu de l’année » d’après Les Cahier du cinéma, Jessica Forever est le premier long métrage de Caroline Poggi, 29 ans et Jonathan Vinel, 31 ans, auteurs de plusieurs cours métrages remarqués aux titres poétiques et polémiques comme Tant qu’il nous reste des fusils à pompe (à voir en intégralité ici) Ours d’Or de la Berlinale 2014. Ils ont participé à Ultra Rêve (15 août 2018) anthologie réalisée avec Bertrand Mandico (Les garçons sauvages et Yann Gonzalez (Un couteau dans le cœur) présenté à la dernière « Quinzaine des réalisateurs ».

Esthétique 90,
musique électro,
périphéries urbaines
Ensemble, ils forment une école informelle nourrie de films de genre et de cinéma expérimental. Mandico incarne le pan mystique et rock de ce trio, Gonzalez sa version érotico vintage, et Vinel et Poggi en assument l’aspect vériste et techno. Jessica Forever raconte la fuite d’un groupe d’orphelin dans un monde qui a décrété leur éradication. La charismatique et protectrice Jessica (Aomi Moyok, vue dans Love de Gaspard Noé) les recueille, et ensemble ils affrontent les drones qu’un pouvoir invisible envoie à leur poursuite. Métaphore de l’intolérance qui se développe en Europe de nos jours, la petite bande de réprouvés évoque tour à tour les migrants, les zadistes, des black bloc ou les djihadistes. Une péripétie du scénario nous fait plutôt pencher vers la plus déplaisante de ses interprétations, rendant le film franchement gênant d’un point de vue politique. Esthétique 90, musique électro, périphéries urbaines, villas désertes, armes de poing, équipements paramilitaires, pick-up, motos et bateaux pneumatiques semi-rigides, le film est un peu un catalogue d’artefact cool (parce que pas cool) de la pop culture pointue. Son univers n’est pas sans rappeler l’ambiance pavillonnaire des séries de Fabrice Gobert (Les revenants, Mytho…), les clips de Romain Gavras (« Stress » pour Justice, « Signature » pour DJ Mehdi), Jamie Harley pour Koudlam ou The Blaze. L’ambiance étrange qui faisait le charme des court-métrages de Poggi et Vinel peine à se déployer sur plus d’une heure et on assiste plus à une juxtaposition de scène, où chaque orphelin retrace son parcours en voix off, qu’a un récit structuré. Comme si le long métrage n’était pas (encore) leur format naturel. Devront-ils passer par la case série, proposer de nouveaux formats courts, des clips ou d’autres anthologies de leur propre travail avant de quitter le statut d’espoir, ici un peu décevant?
- Jessica Forever
- Jonathan Vinel
- Caroline Poggi
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