Detective Dee 3

Tsui Hark, le Spielberg chinois

Cult. Le troisième volet de la saga Detective Dee est l’occasion de se pencher sur le parcours de Tsui Hark. Prolifique réalisateur et producteur hongkongais alternant blockbusters et films plus personnelles. Présentation. 

Temps de lecture 4min

Par Clément Levassort

On le surnomme le Spielberg asiatique… Le réalisateur hongkongais est aussi productif que le roi du divertissement américain et a réalisé plus de 40 films depuis le début des années 80. Aussi à l’aise dans le divertissement populaire, les films de genre que dans un style plus personnel.

il est à 68 ans, une référence qui tient le choc de la comparaison avec Spielberg

Virtuosité de la mise en scène, science du mouvement, langage visuelle, la comparaison est plus qu’évidente !

Tsui Hark a notamment réinventé le film de Sabre (Zu, The Blade…), alternant entre blockbuster et films plus ambitieux (L’enfer des armes son premier thriller politique en 1980 ou Time and Tide salué par Les Cahiers du Cinéma en 2001). Il a réalisé cinq films de la franchise Il était une fois en Chine. Et on lui doit également Le mélo renversant The Lovers (1994) ou le film de guerre La Bataille de la montagne du tigre (2015). Par ailleurs, dans les années 80 et 90 il a produit la franchise Histoire de Fantôme chinois ainsi que les trois volets du Syndicat du crime. Les deux premier réalisée par John Woo et le troisième par lui-même après que les deux hommes se soient brouillés. Si Hark est moins connue en occident que Woo, c’est que ses deux films réalisés pour Hollywood, Double Team et Piège a Hong Kong avec Jean-Claude Van Damme n’ont pas convaincus qu’il a préféré rentrer à Hong Kong.

Mais vu d’Asie, il est à 68 ans, une référence qui tient le choc de la comparaison avec Spielberg. La trilogie Detective Dee* peut s’appréhender comme le pendant chinois de la saga Indiana Jones avec laquelle elle partage certaines similitudes. Le héros charismatique aussi intellectuel que physique, le mélange d’aventure et d’humour. Et surtout cette approche ludique de l’Histoire que les légendes populaires viennent chargés de magie. Le troisième volet de Detective Dee voit de nouveau l’enquêteur – campé par Mark Chao depuis l’épisode précédent – démêler les sombres intrigues de l’impératrice Wu Zetian dans la Chine du VIIème siècle.

La légende des rois célestes est sans doute l’épisode le plus abouti de la franchise. Avec ce troisième tournage en 3D, Tsui Hark atteint un degré de maîtrise formelle épatant. À l’instar de Spielberg ou Cameron, il est l’un des rares réalisateurs à calibrer sa mise en scène pour la projection 3D. Insistant sur les effets de profondeur et de perspective dans la composition des ses cadres créant une sensation d’immersion décuplée. Il fait voltiger sa caméra dans l’espace et suit l’action avec un sens du mouvement et une grâce remarquables. Même les scènes de dialogue bénéficient d’intentions similaires et favorisent les plans moyens pour intégrer les personnages dans leur environnement plutôt que de les emprisonner dans des gros plans. A croire que la 3D est l’outil qui lui manquait.

Avouons cependant que les effets-spéciaux ne sont pas toujours du niveau de ceux d’Hollywood, mais remettons les choses dans leur contexte : Tsui Hark a réalisé son film pour 20 million de dollars américain (un dixième du budget d’un blockbuster moyen). Un tour de force quand on voit le résultat à l’écran, et le final dantesque notamment. Il les dépasse même largement en terme de création d’un univers esthétique riche et cohérent. Le récit, parfois hardu, est traversé de personnages haut en couleurs et immédiatement attachants. Comme le fidèle second du Détective, Shatuo Zhong (Kenny Lin), side kick aussi comique que touchant. Film à intrigue et spectacle total, Detective Dee démontre une nouvelle fois la maestria d’un réalisateur-artisan surdoué, dévoué au cinéma populaire.

* inspiré des enquêtes policières du Juge Ti popularisées par Robert Van Gulik (10/18)

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