Daphné

Sucrée Salée

Film. Portrait sensible d’une londonienne hypermoderne. « Like a romantic comedy with all the bullsh*t taken out » proclame l’affiche britannique de Daphné. Promesse tenue ?

Temps de lecture 3min

Par Jacques Braunstein

 

Daphné a un peu plus de trente ans, travail en cuisine dans un restaurant à la mode du sud de Londres et aimerait bien devenir chef. Le soir après le service elle sort dans les bars et boit un peu trop. Elle y fait des rencontres masculines mais refuse les relations impliquantes. Sa mère est atteinte d’un cancer mais elle a du mal à être présente pour elle…

“Dans une comédie romantique, Daphné serait le personnage masculin.”

Daphné vit à Elephant and Castle, un quartier encore populaire mais où les loyers sont déjà au dessus de ses moyens. Les plans d’intérieur ont été tournés dans l’appartement du réalisateur Peter Mackie Burns – dont c’est le premier film – apportant une touche réaliste à cette chronique d’époque.

Daphné est incarnée par Emily Beecham, l’actrice rousse et gracile croisée dans de nombreuses séries anglaises ou dans Ave, César ! des frères Coen. Elle est de tous les plans et a reçu le prix d’interprétation du Festival du film Britannique de Dinard pour ce portrait de femme qui en évoque d’autres. À la recherche de Mister Goodbar dans lequel Diane Keaton fréquentait les bars interlopes du New York de la fin des années 70 ou Sue perdue dans Manhattan (1997) qui montrait l’errance de Anna Thomson dans une ville normalisée et impersonnelle. Mais ces deux films suivaient leur héroïne vers une issue aussi tragique qu’inéducable. Alors que Daphné montre l’irrésolution de son personnage comme une phase de son apprentissage. Et l’événement violent auquel elle sera confrontée –  que nous ne dévoilerons pas – n’est pas présenté comme la punition de sa vie dissolue selon une morale à l’inconscient finalement misogyne. C’est au contraire l’occasion de surmonter ses peurs et de renouer les fils de sa vie.

Dans une comédie romantique, Daphné serait le personnage masculin, sauf qu’ici il n’est pas question de trouver l’amour pour être soi-même. Pas plus que de triompher des obstacles pour exprimer son individualité comme dans un film d’action. Daphné doit apprendre à être bien seule, pour être bien avec les autres. Et vice et versa. Un joli film sur le difficile et long chemin pour trouver sa place dans les grandes villes hypermodernes.

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