Milos Forman

Requiem pour Miloš Forman

Cult. Le réalisateur de Vol au-dessus d‘un Nid de Coucou, Hair ou Amadeus est mort samedi 14 avril. Retour sur la carrière d’un géant de la contre-culture. 

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Par Jacques Braunstein

« Il ne suffit pas d’avoir un personnage principal et un bon acteur. Chaque visage dans la foule est important. » expliquait Miloš Forman. Auteur de douze longs-métrages, le réalisateur américain d’origine tchèque est mort des suites d’une maladie à 86 ans dans sa maison du Connecticut. Il ne faut pas pour autant voir en lui un honnête artisan. À travers ses films incroyablement divers, il a bâti une œuvre dédiée aux combattants de la liberté.

Né à Čáslav en 1932, devenu orphelin pendant la guerre, Miloš Forman passe à l’Ouest en 1968, au moment de la répression du printemps de Prague. Ses trois premiers films de l’autre côté du rideau de fer (L’As de Pique, Les amour d’une blonde, Au feu, les pompiers !) étaient des satires sociales matinées de féministe qui n’étaient plus guère envisageables désormais. Aux États-Unis, il réalise Taking Off (1971), film s’attachant aux enfants fugueurs des années hippies qui dresse le constat de l’incommunicabilité entre les générations dans son pays d’adoption. Puis, il adapte Vol au-dessus d‘un Nid de Coucou de Ken Kesey, le romancier gourou de la contre-culture. Le film remporte cinq Oscars en 1976, dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur acteur pour Jack Nicholson. Miloš Forman termine sa trilogie hippie avec le film tiré de la comédie musicale Hair en 1979.

Suivrons Ragtime fresque dans l’Amérique ségrégationniste de la belle époque, Amadeus, portrait d’un Mozart immature et fantasque confronté à l’écriture de son Requiem et à la mort… Le film remporte huit Oscars dont son second comme meilleur réalisateur en 1985. En 1989, il poursuit dans cette veine historique avec Valmont. Mais une autre adaptation des Liaisons Dangereuses signée Stephen Frears et sortie quelques mois plus tôt remporte la mise critique et publique.

Sept ans plus tard, nouvelle révolution dans son cinéma avec Larry Flint portrait du magnat du porno (Husler Magazine), qui questionne la liberté d’expression aux États-Unis et lui vaut l’Ours d’argent du Festival de Berlin en 1997. Puis il réalise Man on the Moon (1999) retraçant la carrière du comique Andy Kaufman, sorte de Coluche américain pilier du Saturday Night Live campé ici par Jim Carey. Les années 70, un film en costume et un biopic… Les trois axes de la carrière de Forman semblent résumés par cet avant-dernier film. Un nouveau portrait paradoxal de l’Amérique qu’il aimait et connaissait si bien mais qu’il n’avait cessé de scruter avec le léger décalage de son regard étranger. Depuis il avait réalisé Les fantômes de Goya en 2006 et joué dans Les Bien-aimés de Christophe Honoré.

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