Très court festival

Clap de fin pour le Très court festival, qui mettait en compétition online
des films de moins de 4 minutes venus du monde entier.
Retour sur un palmarès éclectique et cosmopolite.

Par Quentin Moyon 

Temps de lecture 10 min.

Grand Prix – Housecall, de Josh Penn Soskin
Réalisé par l’Américain Josh Penn Soskin, Housecall s’ouvre sur le plan d’une voiture miteuse, dans laquelle un agent de police sirote un soda tout en s’auto-encourageant : « You’re a star… You’re cool ». Il vérifie son odeur corporelle, s’assure qu’il n’a pas de morceau de poireau entre les dents, et entame gaiement sa ronde dans les rues d’une banlieue résidentielle américaine similaire à celle de Wrong Cops, d’un certain Quentin Dupieux… Les choses s’accélèrent quand le flic doit prendre en chasse un voleur de chien. Leur lutte acharnée révélera au grand jour le secret que l’agent dissimule sous son uniforme. On ne vous en dit pas plus, mais la chute de ce court-métrage dynamique, qui dévoile l’identité cachée d’un homme peu sûr de lui, témoigne d’une humanité touchante. Un instant de vie, comme un instant de gloire, qui nous fait rire autant qu’il nous émeut.

Housecall

Film

Prix de l’Animation – Charlotte’s Daydream, de Marlies Van der Wel
Avec Charlotte’s Daydream, La réalisatrice hollandaise Marlies Van der Wel nous invite dans l’espace. Pas de fioriture dans son court-métrage : 1 minute 50 de dessins simples et expressifs, qui nous plongent dans les yeux d’une jeune femme en train de contempler la voie lactée depuis un observatoire. Astres et planètes aux teintes éclatantes se succèdent jusqu’à l’arrivée d’une forme ronde et flottante, d’un noir de jais. Visible aux yeux de tous, sur l’ensemble de la planète, l’objet intrigue la jeune femme. Ni une, ni deux, elle se saisit de son scaphandre, plonge à l’intérieur, et tout s’inverse… Un film aux allures de conte, qui tire sa force d’un message environnemental à lire entre les lignes.

Charlotte’s Daydream

Film

Prix de l’Originalité – Symbiose de Paul Raillard
Il est interdit de disposer du corps d’autrui à son envie. Un principe que ne semble pas avoir compris le professeur très frankensteinien de Symbiose, le court-métrage animé du Français Paul Raillard. Du haut de son château, ce savant fou piège les randonneurs perdus, en quête d’un refuge pour se protéger de la tempête dont il lui-même est à l’origine. Une fois devant sa porte, les pauvres diables sont capturés, cryogénisés façon Han Solo dans L’Empire contre-attaque, et broyés. Une bouillie que le professeur s’injecte directement par voie crânienne (c’est scientifique, ça ?!?) pour acquérir des pouvoirs augmentés à X-men. Mais un jour, l’expérience ne se passe pas comme prévu… Et si le cataclysme provoqué par cette manipulation ratée permettait aux hommes et à la nature de vivre enfin en harmonie ? C’est le message de ce film loufoque, qui pousse les travers de notre société à leur paroxysme de manière imagée. Jusqu’à ce que le système titube et laisse place à une nouvelle vie.

Symbiose

Film

Mention spéciale du jury – Lovers, d’Alexandre Brisa
Réalisé dans le cadre du Nikon Film Festival, le court du Français Alexandre Brisa est une relecture du Roméo et Juliette de Shakespeare. Une de plus ! Pourtant le jeune réalisateur parvient à revisiter d’une manière neuve ce chef-d’œuvre aux mille adaptations. Sa version de la fameuse scène du balcon, climax de l’amour impossible entre deux cœurs purs issus de familles rivales, se déroule sur une plage neutre. Des acteurs au profil divers y discutent et se comprennent toujours, malgré leurs différences de génération, de sexe et même de langue. Ici l’amour n’a pas de couleur, pas d’âge, pas d’appartenance culturelle. Il se veut une valeur supérieure et universelle. Un beau message, dont l’intensité montante est sublimée par la musique originale de Laura Brisa et Romuald Lauverjo. Notre coup au cœur.

Lovers

Film

Prix des Droits des Femmes – Strength, d’Agathe Barbier et Hedvig Ahlberg
Agathe Barbier et Hedvig Ahlberg sont à l’origine de Strength, un documentaire anglais précieux, à la gloire du corps féminin dans toutes ses expressions. On y rencontre Sharlene Calliste, dans le gymnase où elle pratique l’haltérophilie. Les images en slow motion et la lumière poudreuse donnent une impression de légéreté, tandis que la voix de la jeune femme dit un poème d’Adèle Hampton sur la force physique et mentale qu’il faut mobiliser pour soulever des poids. Bientôt cette scansion se superpose aux images d’autres femmes. Ventre rond de la maternité, cicatrices d’un cancer du sein, handicap… Marqués par les expériences et les épreuves de la vie, ces corps, filmés de manière élégiaque, n’en sont pas moins beaux, solides et solidaires. Un film à la fois doux et puissant, comme le manifeste d’une féminité qui refuse d’être réduite à des clichés.

Strength

Film

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